PORTELL, s. XIX (Jean-Baptiste Morin, 1812)


 

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REFERÈNCIA BIBLIOGRÀFICA

 
   
 

Jean-Baptiste MORIN

Souvenirs du Colonel Morin sur son séjour en Espagne (1812-1813)

 

1812-13

Durant la guerra que va provocar la invasió francesa, un oficial a qui van assignar el comandament d'un regiment que estava ja operatiu a la península, va viatjar per Espanya en busca dels seus soldats. La dificultat en les comunicacions i el fet que les tropes anaren canviant contínuament de posicions, va fer que aquest coronel no donara amb ells. Prop de vuit mesos va tardar en prendre el càrrec . El cas és que, des que va sortir de Bayona el 23 de juny de 1812 al 4 de febrer de 1813, va escribint un diari on va escribint les peripècies del trajecte, parlant dels llocs per on passa i de les seves impresions del país. Bona part del temps la passa per la costa de Castelló. Aquest diari el trobem en una web francesa dedicada a Napoleó.

[...] Après un séjour à l'armée des Côtes en 1804, il combat avec la Grande Armée en Allemagne et en Autriche. Major au 7e de dragon, il est en Italie et à Wagram dans l'armée du vice-roi Eugène de Beauharnais. Ayant fait ses preuves comme colonel en second de son régiment en 1811, l'Empereur lui donne le commandement d'un autre régiment de dragons, le 51 qui est en opération dans le Sud de l'Espagne. c'est ainsí que le colonel Morin va faire campagne dans la péninsule pendant dix-huit mois. C'est l'object du récit qui va suivre. Dans ce document manuscrit, rigoureusement inédit, récemment acquis en salle de ventes par la Fondation Napoléon, le jeune colonel raconte avec intelligence, précision et parfois avec un certain lyrisme -dans le style et avec l'ortographe de l'époque- ses pérégrinations parfois mouvementées à la recherche de son régiment dans un pays dévasté par quatre ans de guerre. En effet, averti le 23 juin 1812 de sa nomination à la tête du 5e de dragons (ci-devant colonel-géneral-dragons), Morin va mettre plus de sept mois pour rejoindre son commandament. [...)

"L'Empereur m'ayant nommé par décret du 1er juin 1812 colonel du 5e régiment de dragons, je fus informé de ma nomination le 23 du ou le 24 juillet; je partis moi-même en poste avec mon valet de chambre Hauvette le 21 juillet à une heure du matin. J'arrivai le 22 à Château-Renault, le 23 à Poitiers, le 24 à Bordeaux où je séjournai le 25 et le 26. Je descendis à Bayonne [...] Le 31 juillet je vais en bateau promener au village du Boucaut per distant de l'Océan, sur la rive droite de l'Adour [...] Le dimanche 2 août, par une chaleur excessive, pour aller coucher à Saint-Jean de Luz [...] Le lendemain 3 je passe le pont de Bidassoa (riu Bidasoa) et j'entre en Espagne. Il faut déjà être sur ses gardes pour aller du pont à Yrun (Irún) [...] on aperçoit à une demie-lieue de distance à peu près la petite ville de Fontarrabie (Fuenterrabía) [...] On fait halte au village de Ernany (Hernani) et on se remet en route our Tolosa [...] Villaréal (Legutio) [...] Montdragon (Mondragón/Arrasate) [...] Bergara [...] Salinas (Salinas de Léniz/Leintz Gatzaga) [...] Mon séjour se prolongeant à Vitoria (Vitoria-Gasteiz) [...] Mon valet de chambre Hauvette qui était avec moi depuis six ans, que j'avais toujours traité avec bonté, qui paraissait m'être fort attaché déserte pour aller joindre les bandes insurgées, hereusement il ne m'emporte qu'une montre et des choses de peu de valeur. C'est la première fois que j'entends la musique espagnole, si toutes fois (sic) on peut appeler musique, des psalmodies aussi insipides que ridicules. Il est inconvenable que la barbarie d'un pareil chant reste enracinée dans un pays où les airs de danse son les plus vifs et les plus animés. Rien d'aimable en effet comme le fandango, le bollero (sic) et le sorongo (zorongo). [...] Après avoir ait à Vitoria (Vitoria-Gasteiz) un séjour de plus d'un mois et ne voyant aucun espoir de rejoindre mon régiment par la route de Valladolid, je consultais le géneral en chef sur le parti que j'avais à prendre et il me conseilla de retourner à Bayonne pour rprendre la route de Saragosse et de Valence [...] Emany (Hernani) Yrun (Irún) [...] Saint-Jean de Luz [...] Bayonne [...)

Je trouvai à cette époque à Bayonne, le général Souham qui allait y prendre le commandement de l'armée de Portugal, j'aurais bien désiré repartir avec lui, mais je craignais de perdre un tems (sic) parce que l'on parlait de la prochaine jonction des armées du Midi et d'Arragon (sic) à Valence, et je me mis en route pour Pau où j'arrivai le 1er octobre. [...] Je pars à Pau le 5 octobre pour aller coucher à Oloron [...]  le 6 je vais a Bedous [...] j'arrivai le 7 a Urdos, dernier village français. Il est comme tous ceux des montagnes fort resserré et surtout très pauvre. A deux lieues avant d'y arriver, le chemin devient impraticable pour les voitures et même souvent très mauvais pour les chevaux et les bêtes de somme. On nous fait remarquer un rocher immense taillé à pic parla main des hommes, et l'on nous dit que c'est par les Carthaginois, commandés par Annibal lorsqu'il quitta les Espagnes pour marcher contre Rome [...] L'entrée en Espagne par cette route est fort dangereuse dans le rapport des chemnis [...] partons le 8 à la pointe du jour avex dix soldats d'infanterie qui escortaient jusques à Jacca (Jaca) un convoi d'habillement pour l'armée d'Arragon (Aragón) [...] arrivé enfin au col que l'on apelle ici Port (Somport), les chemins deviennent presqu'impracticables [...] Le chemin continue à descendre jusques à Campfranc (Canfranc), premier gîte en Espagne [...] on parle à Campfranc tout à fait la langue espagnole, on ne peut plus se faire entendre avec le français [...] (le 10) Les chemins pour venir à Jacca étant absolument impracticables pour les voitures, tout ces grands seigneurs, toutes ces grandes dames avaient été obligés de les abandoner. Je vis ce jour-là un des plus curieux spectacles que l'on puisse s'imaginer. Des dames dans des litières dorées portées par 20 paysans qui se releyaient de terms en terms (sic), d'autres en amazones et montant de superbes chevaux, d'autres sur des mules, clles-ci à califourchon sur des ânes, celles-là portées sur des chaises ajustées en forme de litière, quelques-unes n'ayant pu se procurer une monture marchand à pied dans la boue [...] Nous allons le lendemain à Ancenigo (Anzánigo) [...] et le lendemain nous partons en bon ordre pour Ayerbé (Ayerbe) [...] au village de Gurrea (Gurrea de Gállego) [...] Nous marchons dans un pays découvert et stérile, laissant à droite le fleuve Gallego (riu Gállego) [...] arrivons à la nuit à Zuera [...] Les environs de Saragosse (Zaragoza) si riants autrefois ne sont plus aujourd'hui qu'un désert, les belles plantations d'oliviers qui fesaient la richesse de ce pays ont toutes été coupées pendant le siège [...] Une grande partie des femmes et des enfants s'étaient réfugiés dans la superbe église de Notre-Dame del Pilar à laquelle ils avaient grande dévotion [...] j'ai éprouvé une bien grande satisfaction de pouvoir en partir le 17 octobre pour aller à Pina (Pina de Ebro) [...] Le 18 nous rencontrons encore quelques partis en allant à Bujarolos (Bujaraloz) [...] Nous séjournons le 20 à Caspé (Caspe), cette ville bâtie sur une colline de l'autre côté de l'Ebre [...] Le 21 octobre nous remettons en route pour aller à Abatea (Batea) [...] de là on va coucher à Pinell (el Pinell de Brai) le 23 pour aller à Tortose (Tortosa) [...] en arrivant au bord de l'Ebre pour entrer dans Tortose, nous sommes arrêtés là fort longtems [...] nous nous mettons en marche à 9 heures du matin par une chaleur excessive, et dévorés par des milieurs de cousins (mosquits) que l'Ebre fait naître, nous traversons une plaine assez fertile [...] arrivons à 4 heures à Ull de Cona (Ulldecona) [...)

(Royaume de Valence) Le pays est toujours égalment beau et égalment bien cultivé jusqu'à Benicarlos (Benicarló) où on va se coucher le lendemain en passant par la jolie petite ville de Vinaroz qui fait un commerce de contrebande fort considérable; nous y fesons (sic) une ample provision de rhum (rom) à 40 f (francs) la bouteille pendant la halte, qu'y fait le convoi. Benicarlos est fameux pour les vins qu'on y récolte; ce village grand et bien bâti, était fort riche autrefois, mais il a été souvent ravagé par l'armée qui ya séjourné; cependant nous y avons été fort bien sous tous les rapports, nous avons visité mes camarades et moi, pendant le séjour que nous y avons fait le lendemain, la forteresse de Peniscola placée sur un rocher dans la mer; on aurait inutilment fait le siège de ce fort tant qu'il aurait eu des vivres; il s'est rendu sans coup férir après la capitulation de Valence.

Nous nous remettrons en route le 27 octobre pour aller coucher à Torreblanca où nous trouvons encore un convoi de malades et de blessés rentrant en France; le village offrant peu de ressources, nous y sommes fort mal, on nous dit qu'il n'y a plus de brigands et que l'on peut voyager seul. En effet, nous n'avons été nullement inquiétés. Le convoi se dirige le 28 sur Castellón de la Plana; le colonel Mermet du 19e régiment de dragons tombe malade en route; il revient heureusement nous rejoindre le soir avec les douze hommes que nous avions laissé pour le garder. Le colonel Duchastel du 21e régiment de chasseurs perd pendant la nuit un très beau cheval arabe, qui s'échape (sic) de l'écurie; il envoye (sic) courir après un maréchal des logis de son régiment, un chasseur et un trompette; ils n'étaient pas revenus quand nous quittons Torreblanca, le lendemain mais vingt-quatre heures après notre arrivée à Valence, ils ramènent ce cheval qu'ils avaient trouvé près du village d'Alcala et arrivés à l'auberge où le colonel Mermet était resté malade et dont il n'était parti que depuis un quart d'heure, ils trouvèrent un parti de 150 chevaux de la bande de Frayle, le maréchal des logis ne perdit pas la tête, il ordonna au trompette de sonner des appels, comme s'il avait eu une troupe nombreuse à réunir, il fit plusieur commandemens (sic) comme si son prétendu escadron fut réuni dans un ravin près de là. Les brigands qui marchaient à lui s'arrêtèrent; ils étaient à 25 pas. Alors il cria: escadron en avant; au trot! marche! Les brigands firent demi-tour, et le maréchal des logis et des deux hommes en firent autant et firent bien, et se sauvèrent à toute course; les brigands ne se voyant point poursuivis et appercevant (sic) trois hommes seulement qui se sauvaient, s'apperçurent (sic) de la ruse mais il était trop tard, nos trois hommes arrivèrent avant eux à Torreblanca d'où on envoya un détachement après eux; is se retirèrent aussitôt dans les montagnes.

Nous trouvons Castellón de la Plana encombré d'un autre convoi qui part pour la France; celui-là était tout composé de militaires venant de l'armée du Midi; les habitans (sic) qui avaient vu passer tous les autres se figurent que nous allons quitter tout à fait l'Espagne et sont par conséquent fort étonnés de voir d'autres troupes françaises qui arrivent; depuis quelques jours un détachement du 4e de hussards s'était joint à nous; de sorte que nous avions environ 150 chevaux. Castillon (Castelló) que l'on apelle (sic) un village et immense et le convoi est fort bien établi ainsi que nous, il y a de superbes maisons, et malgré la grande quantité de monde qu'il y avait à loger, personne se n'est plaint.

On part de bonne heure le 29 octobre, quelques-uns avaient pris l'avance sur l'assurance positive qu'il n'y avait absolument rien à craindre des bandes; nous faisons halte au village de Nulès (Nules) et vers midi nous nous remettons en marche pour Murviedro (Sagunt); le convoi pour la première fois marchait mal ordre; à un quart de lieue du village d'Almenara, je vois deux chevau-légers de la Gare qui faisaient partie du convoi et qui comme moi étaient en avant de l'avant-garde, courir ventre à terre en se dirigeant vers une montagne à la droite de la route, je pique des deux pour voir le motif d'une pareille course; l'avant-garde me suit au galop, le convoi fait halte et se réunit, et nous appercevons (sic) une douzaine de brigands à cheval, qui emmenaient deux hommes, garrottés, ils les lâchent à notre approche et se sauvent à toute course; ils avaient trop d'avance et nous ne pouvons les joindre. Nous ramenons les deux soldats qu'ils avaient pris un moment auparavant et qui étaient nus de la tête aux pieds, ils voyageaient isolément et nous dirent qu'au détour de la montagne où ils avaient été arrêtés, les brigands en avaient déjà pris plusierus, qu'ils les massacraient à mesure et qu'on allait les poignarder au moment où la tête de la colonne s'était présentée, on leur donne quelques hardes pour les couvrir et ils marchent avec nous. A quelques pas de là nous trouvons les cadavres de quatre de ces infortunés, un avait la tête coupée et les trois autres les pieds et les mains, un seul respirait encore, nous l'emportons, mais il meurt un instant après.

Enfin nous arrivons à Murviedro (Sagunt); c'est l'ancienne Sagunte, il n'en reste rien que des pierres éparses où l'on voit des caractères inconnus, mais on y voit encore un superbe amphithéâtre bâti du tems (sic) des Romains, et qui aujourd'hui serait encore tout entier, s'il n'avait été détruit dans ces derniers temps par les Espagnols por bâtir la forteresse de Sagunte sur l'emplacement de l'ancienne ville [...] La route de Murviedro à Valence est tellement couverte de beaux villages [...] il n'y gêle jamais et il y pleut fort rarement [...] Le faubourg de Murviedro (barri de Sagunt, on és l'Avinguda de la Constitució) par où l'on entre a beaucoup souffert, il est entierrement (sic) dévasté. Le Guadalaviar (el riu Túria) que l'on traverse sur cinq ponts superbes n'est autre chose quun misérable ruisseau (rierol), où on peut à peine faire boire un cheval [...] à la vérité il y pleut bien rarement et le ciel y est presque toujours serein. On peut citer à ce sujet l'établissement des Serenos qui, la nuit en parcourant les rues avec une lanterne et une pique annoncent les heures et les temps qu'il fait, ils vont criant d'une voix glapissante: Ave Maria Purissima, son las dace [sic; las doce], Sereno! Je vous salue Marie, il est minuit, le tems (sic) est serein! et comme le temp (sic) est pour ainsi dire toujours le même, le nom de Sereno leur est resté. [...] Les spectacles à Valence quoique bien préférables à ceux de Vitoria et de Saragosse me parurent toujours égalment insipides. [...] Je n'ai rien dit jusqu'à présent de l'habillement des femmes espagnoles, il est presque partout le même, c'est une robe en baskine de soie noire avec une taille fort longue, dessinant parfaitement les formes qu'elles exagèrent tant quelles peuvent; car plus elles sont prononcées plues elles sont bien, et une mantille ou voile noir sur la tête; avec ce costume, elles ont l'art d'être très séduisantes; [...] Il y avait autrefois à Valence une superbe promenade appellée (sic) l'Alameyda (el passeig de l'Alameda), mais on l'a entièrement détruite pendant le siège, elle allait depuis la ville jusqu'au Grao ou port distant de près d'une lieue. [...] Pendant le séjour que j'ai fait à Valence, je suis allé plusieurs fois avec M. le maréchal (duc d'Albufera) [Suchet] visiter son duché, c'est-à-dire le fameux lac d'Albufera. Le rapport de la chasse et de la pêche est fort peu de chose puisue cela ne papporte guerres (sic) que 20 ou 30 mille francs; mais ce qui en fait la véritable richesse, c'est une lisière de 4 à 500 toises de terrain qui entoure presque partout le lac dont la longueur est de tois lieues sur une lieue et demie de largeur, et où lon recueille une quantité énorme de riz et de saffran (sic).

Je pars avec lui (le maréchal) pour San Felipe ou Jaliva (Xàtiva) [...] L'ennemi s'avance vers Almanza (Almansa) [...] Le général ennemi détache un corps nombreux sur le flanc droit du maréchal pour déboucher par Requena et tomber sur Valence [...] San Phelipe fait un commerce considérable d'huile, de soie et d'oranges, je vais faire une course avec M. le maréchal à Moxente (Moixent) [...] nous passons devant le château de Monteza (Montesa) [...] la ville de Cullera offrait peu de ressources parce que le terrain qui l'environne est très sablonneux à cause des débordemens (sic) fréquents du Xucar (riu Xúquer) et du voisinage de la mer [...] Je demande au maréchal et j'obtiens pour ces dépôts la garnison de Lyria (Llíria) [...] Je pars le premier jour de l'An pour Valence par un tems (sic) affreux. J'ai pensé me noyer 20 fois dans les torrents qui innondaient (sic) les champs de toutes parts, les routes avaient totalement disparu, j'arrive cependant grâce à la vigueur de mes chevaux et aux relais que j'avais établis à Alleyra (Lliria) et à Almuzafes (Almussafes) [...] c'était pourtant une contrariété pour moi de retourner par Saragosse, où il était possible que ce convoi (de Madrid) s'arrêta fort longtemps (sic), à cause du rassemblement général de sinsurgés qui, instruits de ce départ, le guettaient au passage dans les défilés qui se trouvent du côté de Calatayud. [...] (Le 17 de janvier 1813) je prends le commandement de toutes la cavalerie de l'armée du Midi dune troupe espagnole appelée Los Escopeteros; ces cerniers sont de vrais chenapans ou autrement des contre-brigands. [...)

On arrive sans accident à Castillon de la Plana (Castelló). Le convoi avait une grande demi-lieue de longueur; c'est le général Lallemand qui le commandait. Le convoi poursuit sa route jusqu'à Benicarlos (Benicarló) où il arrive le 20 janvier; j'avais poussé ce jour-là avec ma cavalerie jusqu'à Vinaraz (Vinaròs). C'est là qu'on me prévient qu'il y a de nouveau contre-ordre et que le convoi retourne à Valence; il faisait un tems (sic) admirable et chacun prit son parti gaîment, moi surtout, car malgré le chemin que nous venions de faire inutilement il y avait plus d'apparence pour moi de rejoindre promptement en passant par la route directe, qu'en prenant celle de Saragosse, qui d'ailleurs outre les dangers provenant de la présence de l'ennemi était presqu'impraticable pour les voitures. Je rentre donc à Vinaros d'où j'étais déjà sorti, j'y séjourne, le convoi rentre aussi à Benicarlos, les marquis Saint-Adrien, grand-maître des cérémonies et Aravacca, majordome du Roi et leur familie viennent me demander l'hospitalité parce qu'ils étaient horriblement pressés à Benicarlos. Nous nous amusons beaucoup, chacun met la main à l'ouvrage, nous finissons par déjeuner fort bien et dîner mieux encore.

On ne part enfin pour Valence, mais après deux jours de marche et à deux lieues du village de Castillon, on reçoit encore un contre-ordre que nous alarma tous, parce qu'on croyait être obligué de retourner encore par Saragosse. Nous avions dépassé dejà le village de Villaréal (Vila-real) et le convoi s'acheminait vers Valence, losque ce contre-ordre arriva. Il était motivé sur la présence d'une escadrille anglaise qui menaçait d'un débarquement et celle d'une bande commandée par Frayle, qui avait paru la veille à Nulès (Nules) avec 5 ou 600 chevaux. Qu'on se figure un convoi aussi nombreux devant faire une contre-marche, par un tems (sic) très mauvais, sur une route qui, quoique belle est cependant trop étroite pour l'opérer avec deux voitures de front, toutes ces dames qui étaient enchaintées de retourner à Valence se voyant obligées de rétrograder de nouveau; l'ennemi de tous côtés, les homes à cheval cherchant tous à gagner la tête du convoi pour éviter le danger, les femmes pleurant et criant de craintre d'être prises, une terreur panique s'emparant de tous ces gens-là, chacun enfin cherchant à suir, on ne pourra pas encore se faire une idée du désordre qui eut lieu pensant un moment; heureusement en partant de Castillon, je faisais l'arrière-garde avec 200 chevaux; je me trouvais pas conséquent en tête du convoi lors de la retraite et à l'aide de quelques coups de sabre aux plus peureux et en barrant entièrement la route, je parvins à arrêter tout ce qui voulait marcher plus vite que moi. Je me mis en position de l'autre côté du village de Villaréal et après avoir vu défiler tout le convoi où il n'y avait plus besoin de vagmestre pour faire serrer les voitures, je reçus ordre d'aller m'établir à Buriana (Borriana) sur le bord de la mer pour m'opposer autant que possible à toute tentative de débarquement. Je traversai pour m'y rendre une troisième fois ce même village de Villaréal, au grand étonnement des habitans (sic) qui ne savaient que penser de cette fluctiation et j'arrivai à 9 heures du soir à Buriana par une pluie épouvantable. Après avoir établi tous les postes, je me retirai chez moi avec tous les officiers; il n'y eut rien de nouveau jusqu'au lendemain à 4 heures après midi que je reçus l'ordre de me rendre à Marviedro (Sagunt). Je partis 10 minutes après; j'avais 9 lieues d'Espagne qui en sont au moins 13 de France et de chemins de traverse et un tems (sic) et qu'il fallait bivouaquer ou se loger militairement. Je préférai le dernier parti attendu que nous nous trouvions sous la protection de la forteresse de Sagunte. Je partis seul le lendemain pour Valence, j'allais chez le gouverneur pour me faire doner le même logement que j'avais eu auparavant et qui m'avait été conservé par ordre du maréchal; en arrivant sur la place Sant Augustino où il loge [...)

Le maréchal se décide à faire passer le convoi par Requeña (Requena) et la Manche (La Mancha) [...] en passant les montagnes de las Cabrillas et de Contreras [...] (le 2 février) arriva à la nuit a Bunol (Buñol) où toutes les voitures parquèrent sur une hauteur à l'entrée du défilé de Cabrillas [...] Le 4 février nous arrivons de bonne heure à Utiel où je trouve mon régiment en entier qui attendait sous les armes mon arrivée; je suis reçu colonel par le général Sparre mon prédécesseur au 5e de dragons. [...)

Et arrive à la nuit à Villalgordo (Villargordo del Cabriel) [...] Le 5 le convoi couche à Minglanilla et traverse non sans peine pour y arriver les montagnes de Las Contreras [...] au pont de la Venta de Contreras [...] Le 6 le régiment couche à Ledaña et je reste à Yniesta (Iniesta) [...] jusqu'à Villanueva de la Jarra (Villanueva de la Jara) [...] le 9 à Gambaldon (Gabaldón) [...] Le 10 à Buenache de Alarion (Buenache de Alarcón) [...] Le 11 en passant par Valverde, nous allons à La Parra (La Parra de las Vegas) [...] Le 12 à Cuenca [...] le 27 nous passons par Honrrubia (Honrubia) pour aller coucher à San Clemente, bourg très considérable de la Manche [...] le 28 le régiment couche à San Pedroñeras (Las Pedroñeras) [...] Le 1er mars, nous arrivons au Toboso (el Toboso) -patrie de l'héroïne de la Manche. C'est un beau et bon village, il paraît que depuis le tems (sic) où l'aimable auteur de Don Quichotte a écrit sa joyeuse histoire, les femmes de Toboso, n'ont pas embelli, celles que nous avons vues auraient pu passer pour autant de Dulcinées- [...] le lendemain 2 nous rencontrons en passant à Quintanar (Quintanar de la Orden) [...] Nous couchons à El Coral del Almaguer (Corral de Almaguer) [...] Le 3 après avoir fait halte au village de Villatolas (Villatobas), nous arrivons à Ocaña [...] sur le bord des ravins qui avoisinent le Tage (riu Tajo) [...] je vais ce même jour au village de Santa Cruz (Santa Cruz de la Zarza) [...] à Tarancon en passant par la Zarza (Zarza de Tajo) [...] Je vais le lendemain coucher à Torrubia (Torrubia del Campo) qui est un fort bon village en passant par Fuente Pedroneras (Fuente Naharro) y Acebron (El Acebrón) [...] Je me remets en marche le 22 pour aller coucher à Vittatobas (Villatobas). [...] Je rentre le 24 mars à Ocaña. [...] La división part d'Ocaña et fait halte à Aranjuès (Aranjuez) [...] Nous séjournons le 31 à Colmenar de Dreja (Colmenar de Oreja) et nous nous établissons le 1er avril à une lieue en arrière du village de Chinchon [...] Nous arrivons à 3 heures à Madrid. Nous nous formons en bataille sur le Prado (El Pardo). [...] Le 6 avril à Colmenarejo [...] nous étions fort près de l'Escurial (El Escorial) [...] l'endemain nous passons les montagnes de Guadarrama [...] et nous arrivons à la nuit à Villacastine (Villacastín) [...] Le 8 avril nous allons à Arrevalo (Arévalo) [...] pour les laines de la province de Ségovie (Segovia) [...] Le 9 nous rendons à Medina del Campo [...] Le 10 nous nous mettons en marche à 4 heures du matin pour venir à Toro [...] au bord du Duero (río Duero) [...] Le 25 mai au soir, on est instruit que les armées espagnoles et anglaises se sont portées en force sur Salamanque (Salamanca) qui a été évacuée par nos troupes; je reçoit l'ordre de me tenir prêt à marcher avec mon régiment pour aller à leur rencontre à une marche de Toro et je pars le 26 mai à 4 heures du matin pour aller les combattre. La suitte (sic) à l'ordinaire prochain.

Toro 26 mai à 2 heures du matin, an 1813."

[MORIN, Jean-Baptiste: Souvenirs du Colonel Morin sur son séjour en Espagne (1812-1813), annotés par le Colonel Paul Willing. Revue du Souvenir Napoléonien, núm.378, page: 2-20. Publication: mois 08, année 1991.]  napoleon.org


 

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Recopilació bibliogràfica i transcripcions de Jacint Cerdà